Lorsque l’on pratique un sport, notre corps s’expose à une part de risque. En effet, les traumatismes, les contusions et les entorses sont fréquents et particulièrement dans les sports collectifs.

La pratique du  football n’échappe pas à ce constat. Que ce soit dans une pratique amateur ou professionnelle, plus les matchs se multiplient et la saison avance, plus le corps est sensible aux blessures et aux accidents.

En moyenne 45 000 personnes se blessent chaque année en jouant au football en Suisse. Selon une étude spécialement consacrée aux accidents de football, 70 % des blessures se produisent au sein d'un club (50 % durant les matchs et 20 % à l'entraînement). (Réf : Suva)

Il est possible de limiter les conséquences de ces traumatismes en préparant son corps (préparation physique, échauffements etc.) et en ayant une bonne prise en charge médicale en cas de blessures.  

Le Professeur Jacques Menetrey, Chirurgien orthopédique spécialiste du genou et du muscle au Centre de Médecine du Sport et de l’Exercice, nous parle des pathologies fréquentes liées à la pratique du football. 

Professeur  Jacques Menetrey, quelles sont les blessures les plus fréquentes au football ? 

Prof Jacques Menetrey : Dans la pratique du football, les blessures les plus fréquentes sont les atteintes musculaires et ligamentaires et plus de 50% des blessures surviennent aux membres inférieurs. Avec l’image des sports de glisse, le  football  génère des entorses articulaires notamment du genou, car c’est un sport dit « de pivot », avec de fréquents contacts et changements de directions, se jouant sur une surface irrégulière, voire changeante. 

En revanche, le football cause également des entorses de la cheville que l’on rencontre que très rarement dans les sports de glisse.

Comme le montre le graphique ci-dessous, ce sont principalement les  jeunes adultes qui sont sujets aux  diverses blessures dans la pratique du football. Ceci peut s’expliquer par le nombre de pratiquants dans ces classes d’âges et par l’intensité et l’engagement que les  joueurs de cette catégorie mettent dans le jeu. 

 

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Pouvez-vous décrire quelles sont les différentes blessures musculaires ?  

Prof Jacques Menetrey:  Les lésions musculaires peuvent être divisées en deux catégories principales :

–      les lésions fonctionnelles

–      les lésions structurelles

Les lésions fonctionnelles sont provoquées par une surcharge ou une surutilisation du muscle et vont des courbatures aux lésions neuromusculaires en passant par la contracture musculaire.

Les lésions structurelles incluent les déchirures partielles et mineures, les déchirures partielles et modérées et vont jusqu’à la déchirure subtotale  complète du muscle ainsi que l’avulsion tendineuse.  
Le dommage structurel du muscle dépend de l’énergie du traumatisme et peut être causé soit par un choc direct soit par une tension supérieure aux capacités élastiques du muscle survenant dans un mouvement intense et mal contrôlé.
Dans le football, ce sont essentiellement les muscles ischio-jambiers et quadriceps qui sont le siège de lésions structurelles.

Les lésions fonctionnelles (courbatures-contractures) surviennent après un effort physique inhabituel,  répété ou trop intense qui provoque des microtraumatismes musculaires. Celles-ci conduisent l'organisme à déclencher une réaction inflammatoire pour les réparer. Elles surviennent alors dans les 12 à 48 heures qui suivent l'exercice physique. Elles n’entrainent aucune lésion et le simple repos ainsi que des étirements sont recommandés pour une récupération rapide.

Dans la déchirure structurelle mineure (élongation), le muscle est allé au-delà de ses possibilités d'étirement mais cela n’est que peu douloureux. Il est possible, de parfois, de continuer son effort mais celui-ci devrait être limité, voire stoppé. Une consultation médicale s’impose. Le traitement, dans ce cas, impose de la glace les 24 premières heures, de suivre un traitement de physiothérapie avec massage  et de progressivement remettre le groupe musculaire en action. En général, il faut compter 1 semaine à 10 jours avant de pouvoir reprendre progressivement l’entraînement et retrouver une activité sportive complète.  

Lors de la déchirure structurelle modérée (encore appelé claquage), il y a rupture d’un nombre plus ou moins important de fibres musculaires (des cellules capables de contractions contenues dans les muscles). Une douleur survient brutalement et interrompt immédiatement le joueur dans sa course.  

Parfois un claquement se fait entendre d’où le terme populaire de claquage. Le muscle se raidit et parfois une ecchymose apparaît sous la peau. Le traitement initial est la protection du segment musculaire, le repos, l’application de glace durant les 24 premières heures et l’application d’une compression cylindrique. La prise en charge par physiothérapie se fait dès le troisième jour et en fonction de la douleur, une remise en action  du muscle  est réalisée. Le temps de guérison peut s’étendre de deux à six semaines selon la sévérité de la lésion.

Finalement, le joueur peut être victime d’une rupture musculaire partielle ou complète qui survient généralement à la jonction entre le muscle et le tendon. La lésion est généralement investiguée par IRM  et le traitement est adapté à la sévérité de la rupture. Les lésions  sévères sont  traitées chirurgicalement.  Le temps de guérison est  dans ce cas de trois à six mois.

Dans tous les cas, une préparation physique progressive et de qualité incluant un travail de résistance musculaire, le développement de la flexibilité et de l’agilité, un entraînement de saut et d’équilibre, ainsi qu’un échauffement sérieux et une hydratation adaptée représentent les meilleures protections contre les déchirures musculaires.

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Quelles sont les blessures ligamentaires ? 

Prof Jacques Menetrey : Le football est responsable de 25% des entorses du genou et de 21% des entorses de la cheville (Réf : Suva). Elles peuvent être bégnines ou sévères. Seul un médecin pourra identifier la sévérité des traumatismes. La blessure la plus fréquente chez les joueurs de football est la rupture des ligaments croisés (LCA). Ce sport de pivot demande des appuis fermes et précis. Lorsque ces derniers sont mal contrôlés, le genou peut subir un mouvement de  rotation violent et inapproprié engendrant la rupture ligamentaire. Il est parfois difficile de marcher après une rupture des ligaments croisés, mais pas toujours. Si un gonflement du genou (épanchement) survient, une prise en charge médicale est nécessaire.

Pour la cheville, si une tuméfaction importante associée à une ecchymose s’associe à des difficultés à la  marche, l’évaluation par un spécialiste est alors conseillée.

Comment diagnostique-t-on une rupture du LCA ? 

Prof Jacques Menetrey : On diagnostique la rupture du LCA en effectuant des tests cliniques qui demandent un peu d’expérience, mais qui restent au centre de la démarche diagnostique. La mesure de laxité (jeu articulaire) et l’IRM sont des compléments diagnostiques qui aident à la stratégie thérapeutique. La décision entre un traitement chirurgical ou un traitement fonctionnel se fait au cas par cas en fonction du profil du patient et de divers paramètres dont la laxité articulaire, les lésions articulaires associées, le type d’activité et de sport. Il est vrai qu’il est difficile de pratiquer un sport de pivot-contact comme le football sans un ligament croisé antérieur compétent.  Les joueurs s’exposent alors au risque de lésions méniscales secondaires. 

Quels sont les traitements ? 

Prof Jacques Menetrey: Le traitement fonctionnel consiste en un entraînement musculaire et neuromusculaire permettant une stabilisation statique et dynamique du membre inférieur.  La récupération de la force est importante, mais le travail neuromusculaire, d’équilibre, de contrôle du mouvement et de la technique propre au football est capital pour envisager un retour aux jeux.  Ce travail est réalisé dans un premier temps avec le physiothérapeute, puis poursuivi par le patient lui-même afin d’optimaliser la « ré-athlétisation » de son organisme. Dans le football, cette approche est compatible avec une pratique amateur et de loisirs plutôt chez un vétéran, pour autant que la lésion du ligament croisé antérieur soit isolée.

Le traitement chirurgical  consiste en une reconstruction du ligament croisé antérieur ou ligamentoplastie. Les joueurs jeunes avec une pratique du football en compétition, qui très souvent présentent des lésions associées des ménisques et parfois du cartilage bénéficient de cette approche chirurgicale

En quoi consiste la ligamentoplastie et combien de temps de récupération avant retour au sport ? 

Prof Jacques Menetrey : La reconstruction du ligament croisé antérieur ou ligamentoplastie nécessite l’usage d’une greffe qui peut provenir des tendons ischio-jambiers, du tiers central du tendon rotulien ou du quart central du tendon quadriceps. Plus rarement, l’usage d’une allogreffe (greffe provenant d’un donneur) peut être indiqué. Cette greffe est ensuite placée dans le genou sous contrôle d’une technique arthroscopique et fixée de diverses manières.

La rééducation est débutée dès le premier jour après l’intervention chirurgicale et est individualisée en fonction des lésions associées et du type de greffe implantée.

Le premier objectif est la récupération de la mobilité articulaire et du contrôle musculaire.

Ensuite, le contrôle de la stabilité du membre inférieur est travaillé dans le même temps que l’entraînement musculaire et la récupération de la force sont réalisés. De nos jours, avant de laisser le patient retourner à des activités sportives de type pivot-contact, des tests fonctionnels évaluant la récupération de la force et des capacités neuromusculaires, ainsi que psychologiques sont pratiqués entre le cinquième et huitième mois qui suivent l’opération.

Avant cela, le patient a repris des activités dans l’axe comme le vélo, la natation, la marche en montagne et la course à pied entre la sixième semaine et le quatrième mois post-opératoire.  Plus qu’un délai temporel, c’est la récupération des compétences physiques et neuromusculaires du patient qui détermine le retour aux activités physiques, professionnelles et sportives

En conclusion 

Prof Jacques Menetrey : L’évolution de ses genoux traumatisés à long terme dépend de nombreux facteurs.  Néanmoins,  si le patient reste actif  et physiquement bien conditionné dans sa vie post-football, les résultats fonctionnels restent durablement favorables à très favorables.

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L'anatomie du genou

Légende:

1.      Fémur

2.      Tendon rotulien

3.      Rotule

4.      Cartilage

5.      Ligaments croisés

6.      Ligament latéral interne

7.       Ménisque

8.       Tibia

Interlocuteur

Spécialiste en: Médecine interne générale
Spécialiste en: Chirurgie plastique, reconstructive et esthétique
Spécialiste en: Ophtalmologie
spécialisé en: Ophtalmochirurgie
Spécialiste en: Dermatologie et vénéréologie
Spécialiste en: Radiologie
Spécialiste en: Cardiologie , Médecine interne générale
Spécialiste en: Médecine interne générale
Spécialiste en: Gynécologie et obstétrique
spécialisé en: Gynécologie-obstétrique opératoire
Spécialiste en: Chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur