Les techniques et approches péri-opératoires en chirurgie digestive ont beaucoup évolué ces dernières années. L’arrivée de la chirurgie mini-invasive par orifice unique, complétée par la mise en place des programmes de Réhabilitation Améliorée après Chirurgie (chirurgie Fast-track) permettent aux patients d’être opérés avec moins de traumatismes et de récupérer plus rapidement.

Retour avec le Dr Pascal Bucher et la Dresse Sandrine Ostermann, chirurgiens résidents à Hirslanden Clinique La Colline, sur ces techniques et approches qui ont révolutionnés la chirurgie digestive et qui améliorent la sécurité et le bien-être du patient.

clinique-la-colline-news-sans-traces-2
Cholécystectomie par orifice unique

Comment la chirurgie abdominale par orifice unique a-t-elle été développée ?

Dr Pascal Bucher : La chirurgie abdominale par orifice unique (Single Access Endoscopic Surgery, SAES) s’est développée pendant les années 2000. Des chirurgiens, dont le Dr Sandrine Ostermann et moi-même, se sont intéressés aux travaux très innovants de pionniers qui, dès l’introduction de la laparoscopie, avaient tenté d’explorer cette approche mais se heurtaient à des limitations techniques. Nous avons alors travaillé avec les sociétés d’équipements médicaux afin de développer une instrumentation spécifique et évaluer les techniques chirurgicales rendant ainsi cette approche sûre et efficace. J’ai ainsi en parallèle avec des confrères internationaux débuté dès 2006 un programme clinique de chirurgie par orifice unique (SAES) en chirurgie digestive et depuis nous nous sommes investis dans son développement au service des patients.

L'essor de cette approche chirurgicale est liée au développement d’une instrumentation chirurgicale spécifique, ainsi qu’à l’introduction du laser pour la dissection, et grâce aux collaborations entre chirurgiens, ingénieurs et les sociétés d’équipements médicaux . Depuis 2006, les avancées ont permis de nombreux progrès en chirurgie par orifice unique qui permettent aujourd’hui, d’être proposée à nos patients en toute sécurité. En effet, la chirurgie par orifice unique offre actuellement une sécurité et une efficacité similaire aux autres approches chirurgicales (laparoscopie, chirurgie ouverte, etc.) en étant moins traumatisante que ce soit pour des chirurgies digestives, ou des chirurgies urologiques ou encore thoraciques. De nombreuses études scientifiques ont confirmés ces résultats, dont une partie est issue de notre travail.    

Cependant la chirurgie par orifice unique ne fait pas que reproduire les résultats de techniques plus anciennes, elle offre aux patients un plus grand respect de leur intégrité physique et de leur image corporelle en leur permettant d’avoir une chirurgie sans traces, sans cicatrice visible, ouvrant une nouvelle ère de la chirurgie.

one-trocart_la-colline
One trocart :
instrument chirurgical qui peut être associé à un système optique pour effectuer une exploration visuelle de la cavité abdominale
Cholécystectomie par orifice unique

Quelles sont les particularités de la Chirurgie par accès unique (SAES) ?

Dr Pascal Bucher : La chirurgie par orifice unique, Single Access Endoscopic Surgery (SAES) consiste en une évolution logique de la chirurgie laparoscopique ayant pour but de diminuer les traumatismes de la paroi abdominale associée à une chirurgie digestive.    

La diminution des traumatismes cutanés et de la paroi abdominale offre plusieurs avantages. Certes le premier est esthétique, une seule petite cicatrice très discrète, voire invisible en lieu et place de plusieurs ou de larges cicatrices qui laisseront la trace d’une opération et en marqueront le souvenir. Mais les autres avantages ont une importance non-négligeable. Cette unique petite incision peut diminuer les risques de complications liés à plusieurs incisions (laparoscopie) ou à une large incision (chirurgie ouverte). Cela permet de diminuer également  les douleurs post-opératoires, les risques de saignement ou celui de hernie (éventration) à plus long terme. Un traumatisme pariétal unique et minimal est associé à une meilleure et plus rapide convalescence. Ces résultats ont été démontrés par de multiples travaux scientifiques

Quelles interventions sont réalisées en Chirurgie par orifice unique (SAES) ?

Dr Pascal Bucher : Un vaste éventail d’interventions digestives ou d’autres spécialités chirurgicales peuvent être réalisés par chirurgie par orifice unique (SAES). Concernant la chirurgie digestive le meilleur exemple est la cholécystectomie (ablation de la vésicule biliaire); mais des chirurgies de hernie, du colon, et de l’appendice par exemple sont couramment réalisées par nos soins depuis plusieurs années avec succès.

La possibilité de réaliser une intervention par orifice unique dépendra de l’équilibre entre le bénéfice et le risque du choix de cette approche en faveur d’une approche par laparoscopie conventionnelle (multiples orifices) en fonction du type d’opération envisagée, la pathologie, différents facteurs en lien avec la santé du patient et de la maîtrise de cette approche par l’équipe chirurgicale. Nous avons ainsi, depuis 2008, organisé des cours nationaux et internationaux pour former les chirurgiens à cette approche.

En complément de cette technique moins invasive pour le patient, vous appliquez depuis de nombreuses années également les programmes de Réhabilitation Améliorée après Chirurgie (ou chirurgie « fast-track ») pour la plupart des opérations réalisées en SAES. Que sont ces programmes et quels sont les bénéfices pour le patient ? 

Dr Sandrine Ostermann : La réhabilitation améliorée après chirurgie (RAC) ou « chirurgie  fast-track» est un concept de prise en charge multimodal et multidisciplinaire destiné à réduire le stress péri-opératoire, diminuer le risque de complications et la durée de séjour, tout en améliorant le bien-être et la satisfaction du patient.Les programmes de RAC, initialement développés par le chirurgien danois H. Kehlet au Danemark après chirurgie colorectale, existent depuis plus de 30 ans, et ont permis une diminution de 30 à 50% des complications postopératoires et de la durée de séjour.     

Ces programmes ont depuis lors été largement validés pour de nombreuses autres chirurgies telles que la chirurgie abdominale majeure (pancréatique, hépatique, œsogastrique), urologique (prostatectomie, cystectomie, néphrectomie), gynécologique (hystérectomie, ovariectomie, mastectomie), vasculaire (cure d’anévrysme de l’aorte abdominale), thoracique (résection pulmonaire) et orthopédique (arthroplastie hanche, genou, épaule), comme le confirme encore la dernière grande méta-analyse sur plus de 5000 patients (réduction de 30% des complications et de 1.14 jours d’hospitalisation, toute chirurgie confondue. (références dans l'encart "Documents")

Chaque étape du parcours hospitalier est organisée en suivant un plan thérapeutique (itinéraire clinique) selon un protocole de soins fondé sur les meilleures données scientifiques (« evidence-based médecine ») dont l’efficacité a été largement démontrée.    

Ce parcours commence au moment de la consultation chirurgicale préopératoire. Cette consultation spécialisée est destinée à optimiser la santé du patient avant sa chirurgie en détectant et corrigeant les éventuels risques ou carences du patient pouvant avoir un impact sur sa récupération et le risque de complications. Elle est également un moment de partage d’information sur la prise en charge péri-opératoire et les suites de l’hospitalisation. 

Ces programmes de réhabilitation améliorée après chirurgie se combinent en effet idéalement avec les techniques chirurgicales mini-invasives telles que la laparoscopie conventionnelle ou par orifice unique. Les avantages de ces programmes ont également été démontré lors de chirurgies ouvertes, malgré les traumatismes associés à cette approche. 

Cette prise en charge combinée permet de proposer aux patients un suivi optimal et des techniques chirurgicales de pointe. 

** La laparoscopie (ou cœlioscopie) consiste à visualiser l'intérieur de l'abdomen en utilisant une caméra dotée de fibres optiques permettant d’illuminer la cavité abdominale. Cette technique permet d'intervenir sur les organes de la cavité abdominale et la paroi abdominale avec un traumatisme minimal de la paroi abdominale, se limitant à quelques petites incisions.

REFERENCES 

Médecins 361